Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Romains
Frères,
Aucun d’entre nous ne vit pour lui-même, et aucun ne meurt pour lui-même : si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur ; si nous mourons, nous mourons pour le Seigneur. Ainsi, que nous soyons vivants ou morts, nous appartenons au Seigneur.
Car si le Christ a traversé la mort, puis est revenu à la vie, c’est pour être le Seigneur des morts comme des vivants.
Toi donc, pourquoi condamnes-tu ton frère ? Et toi, pourquoi dédaignes-tu ton frère ? Nous tous, en effet, nous nous présenterons devant le tribunal de Dieu.
Car il est écrit : Par ma vie, déclare le Seigneur, tout genou pliera devant moi, et toute langue célébrera Dieu.
Ainsi chacun d’entre nous devra rendre compte à Dieu pour lui-même.
Dans notre vie comme dans notre mort, appartenir au Seigneur
Comprendre et vivre la seigneurie du Christ dans nos choix, nos relations et notre destin.
La parole de saint Paul aux Romains nous invite à une conversion radicale de notre regard sur la vie et la mort. Destiné à toute personne cherchant un sens plus profond à son existence, ce texte révèle que dès maintenant, nous sommes entièrement à Dieu. Il s’adresse spécialement à ceux qui luttent avec la peur de la mort, le jugement d’autrui ou les conflits communautaires. À travers cette lecture, le lecteur pourra s’approprier une dynamique spirituelle qui fortifie, apaise et unit.
Ce texte déploie d’abord le contexte complexe de l’épître aux Romains et la réalité des tensions dans la communauté. Puis, il explore la conviction fondatrice de l’appartenance à Christ en vie et en mort. Ensuite, il développe des axes thématiques sur la liberté chrétienne, le respect mutuel et la responsabilité devant Dieu. La tradition théologique sera convoquée pour enrichir la réflexion, suivie de pistes pratiques de méditation.

Contexte
L’épître aux Romains, écrite par saint Paul autour de l’an 57, s’adresse à une communauté chrétienne diverse, réunissant à Rome des convertis juifs très attachés aux observances mosaïques, et des convertis issus du paganisme, vivant dans une liberté nouvelle (Rm 14, 1-6). Cette diversité engendrait conflits et jugements réciproques, notamment sur des questions alimentaires et la célébration des jours ().
Le passage en Romains 14, 7-12 s’inscrit dans cette dynamique de tension. Paul exhorte à dépasser ces désaccords pour vivre en unité devant la seigneurie du Christ qui règne sur la vie et la mort. Le contexte liturgique suggère que ce texte est souvent lu dans des célébrations funéraires ou moments de crise, où la conscience de la mort et du jugement ressurgit fortement ().
Spirituellement, ce texte relie la perspective chrétienne sur la mort à la résurrection du Christ, qui a vaincu la mort et a autorité sur tous. Il affirme un rapport unique de chaque croyant avec Dieu, surpassant les opinions humaines, clivant l’élément central de foi vive. Ce texte est un appel fort à la paix et à la charité dans la communauté ().
Le texte source :
Paul écrit que nul ne vit ou meurt pour soi-même, mais pour le Seigneur. Par sa mort et sa résurrection, le Christ est Seigneur des vivants et des morts. Il appelle à ne pas juger ni mépriser son frère car chacun rendra compte à Dieu, devant qui tout genou se pliera et toute langue reconnaîtra sa gloire.
L’appartenance totale au Seigneur
L’idée directrice de ce passage est la souveraineté totale du Christ sur la vie humaine, dans sa fragilité et son destin ultime. Paul affirme avec force que « dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur » (v. 8). Cette assertion repose sur un paradoxe puissant : si la mort est inévitable, elle est désormais intégrée et transformée par la mort rédemptrice du Christ, vainqueur et Seigneur. Cela libère le croyant de toute forme de crainte ou de jugement en ce monde.
Le texte développe un dynamisme éthique et spirituel : la vie du croyant ne s’arrête pas à soi-même, elle est toujours offerte à Dieu. Chacun est appelé à vivre « pour le Seigneur », dans la liberté mais aussi la responsabilité devant son jugement. Ainsi, le questionnement sur l’autre – juger ou mépriser – est marginalisé, car seul Dieu « tient debout » chaque serviteur (v. 4). Chaque acte humain revêt une dimension spirituelle et relationnelle.
Existentialement, ce texte invite à une conversion majeure : vivre en conscience que l’on appartient à Dieu, et que chaque moment compte. Théologiquement, il souligne la messianité du Christ, la puissance de sa résurrection, et la seigneurie qui s’exerce non par domination mais par amour et appel à la liberté véritable des enfants de Dieu.

Seigneurie du Christ et liberté responsable
La mort et la résurrection du Christ rendent visible la seigneurie divine sur la vie. Cette seigneurie ne restreint pas la liberté humaine mais la transforme. Vivre pour le Seigneur signifie exercer une liberté qui ne dépend pas de nos intérêts personnels mais qui se configure à la volonté aimante de Dieu. Ce lien fondamental libère du jugement mutuel (). La liberté chrétienne s’exprime à travers un amour respectueux des consciences, évitant de causer scandale ou offense, en témoignant d’un service humble à l’autre.
Relation fraternelle et non-jugement
Paul invite à réfuter toute attitude de jugement ou de mépris entre croyants. Ici, la conscience individuelle joue un rôle crucial, mais toujours dans l’attitude d’acceptation et de soutien mutuel (). Celui qui juge oublie que chaque frère est au Seigneur qui seul juge. Cette posture pacifie les tensions dans la communauté et ouvre à la charité, permettant à chacun d’être accueilli malgré ses différences.
Responsabilité devant Dieu et vie éthique
Le passage conclude avec la proclamation qu’un jour, chacun rendra compte à Dieu pour lui-même (v. 12). Cette conscience ultime pousse à une vie conforme à la seigneurie du Christ aujourd’hui. Ne plus juger ses frères nous oriente vers un chemin d’humilité et d’amour. L’éthique chrétienne s’enracine ici dans cette responsabilité ultime, qui dépasse totalement les mesures humaines, appelant au respect profond de la liberté de l’autre.

Héritage théologique et spiritualité vivante
Dans la tradition patristique, saint Augustin a abondamment médité sur la souveraineté du Christ et le sens de l’appartenance à Dieu dans la vie et la mort, insistant sur l’unité fondamentale de toute existence sous la seigneurie divine. Le mystique Jean de la Croix évoque cette union transcendante où la mort n’a plus de prise, car « l’âme appartient à Dieu seul » ().
Liturgiquement, ce texte est central dans les rites funéraires, rappelant que la mort est passage vers une vie nouvelle en Dieu. Dans la spiritualité contemporaine, il résonne comme un appel à accueillir la liberté intérieure face aux épreuves et à vivre pleinement l’unité entre vie terrestre et destinée céleste.
Chemin d’intériorisation pratique
- Méditer quotidiennement sur son appartenance au Seigneur en chaque action.
- Relire ce passage dans la prière, en formulant des engagements personnels.
- Observer dans la journée ses jugements et chercher à les remplacer par la compréhension.
- Pratiquer la bienveillance active envers ceux qui diffèrent dans la foi.
- S’exercer à la confiance dans la souveraineté divine face aux épreuves.
- Participer aux rites et célébrations communautaires pour nourrir cette conscience.
- S’engager dans des actions concrètes de paix et de réconciliation.
Vivre pour le Seigneur, aujourd’hui et toujours
Le passage de Romains 14, 7-12 nous donne une vision puissante et libératrice de notre vie : à jamais, nous sommes à Dieu. Cela transforme notre regard sur nous-mêmes, les autres, et la mort. Dans cette appartenance totale, la liberté chrétienne prend un visage d’amour respectueux, d’acceptation et de responsabilité. À l’heure où juger souvent sépare, ce texte nous invite à déconstruire nos préjugés et à accueillir le frère avec la douceur du Seigneur. C’est un appel fort à vivre une conversion spirituelle et éthique radicale qui nous unit et nous fortifie.

Pratiques simples
- Commencer la journée en affirmant : « Je vis pour le Seigneur ».
- Éviter de critiquer les choix spirituels des autres.
- Offrir un geste de paix à un frère ou une sœur en difficulté.
- Réfléchir avant d’agir : « Mon acte honore-t-il le Seigneur ? »
- Favoriser la prière pour la paix dans sa communauté.
- S’abstenir volontairement d’une liberté pour ne pas blesser un autre.
- Participer régulièrement à la liturgie dominicale, signe de la résurrection du Christ.
Ce texte propose de prendre à cœur le message de Paul aux Romains, pour que la conscience de notre appartenance au Seigneur irrigue toute notre vie, jusque dans la mort, et construise des relations fraternelles fortes, paisibles et responsables.


